Comment se mesure la radioactivité ?

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À RETENIR
  • Le Becquerel (Bq) est l’unité de mesure de la radioactivité d’un corps. Elle caractérise le nombre de désintégrations spontanées de noyaux d’atomes instables qui s’y produit par seconde. Dans le corps humain, la radioactivité est naturellement de 120 Bq/kg.
  • Le Gray (Gy) est l’unité qui permet de mesurer la quantité de rayonnement absorbé par un corps exposé à de la radioactivité.
  • Le Sievert (Sv) est utilisé pour exprimer les effets biologiques des rayonnements ionisants sur la matière vivante. La réglementation française fixe le seuil de dose efficace maximale admissible pour une personne à 1 mSv/an au-delà de la radioactivité naturelle (en moyenne 2,4 mSv/an) en excluant les doses reçues en médecine (en moyenne 1,3 mSv/an).
  • Dans l’industrie nucléaire, le compteur Geiger est très souvent utilisé pour détecter les rayonnements bêta et gamma.
Définition et catégories

Les noyaux d’atomes radioactifs sont des noyaux instables, en raison de déséquilibres dans leur constitution en protons et en neutrons. Afin de retrouver un équilibre, ces noyaux radioactifs se désintègrent spontanément en d’autres noyaux d’atomes plus stables en émettant leur excès de masse sous forme de particules (noyaux d’hélium α, électrons β- ou positrons β+) et/ou de rayonnement électromagnétique (photons gamma). L’énergie émise est appelée radioactivité.

Plus l’activité d’un élément instable est importante, plus sa radioactivité est forte.

Pour mesurer la radioactivité et ses effets, trois unités sont utilisées pour évaluer trois types de grandeurs : la cadence des désintégrations, l’énergie radioactive absorbée et ses effets biologiques.

Le Becquerel (Bq) : mesure de la radioactivité

Le Becquerel (Bq) est l’unité de mesure de la radioactivité d’un corps. Elle caractérise le nombre de désintégrations spontanées de noyaux d’atomes instables qui s’y produit par seconde. Plus l’activité d’un élément instable est forte, plus sa radioactivité est puissante.

1Bq  =  1 désintégration par seconde

Par rapport aux ordres de grandeur qu’elle mesure, cette unité est très petite (à titre d’exemple, la radioactivité du corps humain est supérieure à 8 000 Bq). L’activité des sources s’exprime généralement en multiples du Becquerel ; du kBq (103) au TBq (1012), tandis que l’activité d’échantillons environnementaux s’exprime souvent en mBq (10-3), voire en µBq (10-6).

L’activité radioactive d’une substance est souvent rapportée à :

  • un volume : Bq/l ou Bq/m3 ;
  • une masse : Bq/kg ;
  • une surface : en Bq/m2.

Le Gray (Gy) : mesure de la dose absorbée

Si une personne se trouve dans une pièce où sont présents des atomes instables, seule une partie de la radioactivité ambiante l’atteindra. Cette partie est exprimée par l’unité « Gray ».

Le Gray (Gy) est l’unité qui permet de mesurer la quantité de rayonnement absorbé (appelée dose absorbée) par un corps exposé à de la radioactivité. Il correspond à la quantité d’énergie communiquée à un corps par unité de masse exposée.

1 Gy  =  1 joule par kilo de matière irradiée

Lorsque le facteur temps est pris en compte, la mesure de la quantité de rayonnement absorbée est appelée « débit de dose » : un débit de dose de 1 Gy/h n’aura pas les mêmes effets s’il est subi pendant 5 minutes ou pendant quelques secondes.

Le Sievert (Sv) : mesure des effets biologiques

Le Sievert (Sv) est utilisé pour exprimer les effets biologiques des rayonnements ionisants sur la matière vivante.

Tout d’abord, il est nécessaire de comprendre que les effets de la radioactivité sur les tissus vivants, à dose absorbée égale (mesurée en Gray), varient significativement suivant la nature du rayonnement incident. Par exemple, l’impact du rayonnement alpha, à énergie égale, est le double de celui des rayonnements bêta et gamma.

La dose équivalente radiologique

La dose équivalente radiologique est une notion qui tient compte des effets variables des différents types de rayonnements radioactifs sur les tissus vivants.

Chaque tissu et organe a une vulnérabilité spécifique face à un rayonnement ionisant.

Elle est obtenue en multipliant la dose absorbée par l’efficacité des rayonnements radioactifs α, β ou γ (gamma) sur la moyenne des tissus vivants. La notion de « dose équivalente radiologique » n’est pas une grandeur dotée d’une unité propre, mais elle permet de calculer la « dose équivalente biologique ».

La dose équivalente biologique

La dose équivalente biologique est une dose à l’organe, qui permet d’estimer l’effet subi par un type de tissu ou organe exposé à une radioactivité dont on connaît la composition en α, β ou γ. Chaque tissu et organe a une vulnérabilité spécifique face à un rayonnement ionisant. A titre d’exemple, pour une même exposition, la vulnérabilité tissulaire du foie est trois fois plus importante que celle du poumon. Ce calcul nous permet d’obtenir la « dose équivalente biologique ».

Celle-ci est obtenue en pondérant la dose équivalente radiologique par un facteur de vulnérabilité tissulaire, spécifique à chaque type d’organe pour une même dose de rayonnement absorbée.

La dose équivalente biologique est exprimée en Sievert (Sv). Contrairement au Becquerel, le Sievert est une unité très grande par rapport à ses utilisations courantes. Des effets cliniques immédiats sont constatés à partir de doses de l’ordre de un Sievert. On utilise plus souvent ses sous-multiples (les mSv et µSv).

La dose efficace

La dose efficace permet d’évaluer l’exposition du corps entier aux rayonnements et d’estimer les dommages subis par l’ensemble de l’organisme. Elle tient compte de la sensibilité particulière de chaque tissu irradié et de la nature des rayonnements. Elle est obtenue en additionnant les doses équivalentes de tous les tissus et organes irradiés. La dose efficace est donc en quelque sorte une moyenne des doses équivalentes biologiques sur une personne, une « dose au corps entier ».

La dose efficace est également exprimée en Sievert. Pour toute dose exprimée en Sievert, il convient donc d’indiquer s’il s’agit d’une dose équivalente biologique ou d’une dose efficace.

Fonctionnement technique ou scientifique

Enjeux

La radioactivité est présente à l’état naturel dans notre environnement : en temps normal, plus de 10 becquerels par m3 d’air peuvent être mesurés du fait de particules naturelles. Cependant, certaines activités humaines peuvent avoir un impact sur le taux naturel de la radioactivité, telles que l’utilisation d’instruments médicaux (radiodiagnostic, radiothérapie, imagerie nucléaire, etc.) et la production d’électricité dans les réacteurs nucléaires. Il est nécessaire de pouvoir mesurer et évaluer l’impact et le taux de cette radioactivité dans le but de prévenir les risques humains et de s’assurer du bon niveau des seuils de sécurité.

Au total, un Français est exposé en moyenne à une dose efficace de 3,7 mSv/an.

La réglementation française fixe le seuil de dose efficace maximale tolérée sur une personne à 1 mSv/an au-delà de la radioactivité naturelle (en moyenne 2,4 mSv/an) et des doses reçues en médecine. Aux États-Unis, ce seuil maximal toléré est de 4 mSv/an.

Au total, un Français est exposé en moyenne à une dose efficace de 3,7 mSv/an(1), quasiment exclusivement en raison de la radioactivité naturelle (radon, rayonnements telluriques, rayonnements cosmiques) et de l’exposition médicale.

Moyens

La radioactivité est imperceptible par l’homme. Plusieurs instruments spécialisés peuvent être utilisés pour la mesurer dans un lieu ou sur une personne.

Tous reposent sur le même fonctionnement technique : ils mesurent le nombre d’ionisations (arrachements d’électrons aux atomes) et d’excitations (transmissions d’énergie aux atomes qui passent à un état excité) provoquées par les rayonnements radioactifs qui traversent le détecteur de l’instrument de mesure.

Les détecteurs peuvent mesurer des activités radioactives un million de fois inférieures aux niveaux nocifs pour notre santé.

Techniquement, le rayonnement radioactif passe d’abord dans le volume sensible du détecteur de l’instrument. En fonction de la conception de l’appareil et du type de rayonnements que l’on veut mesurer, ce détecteur peut être un matériau gazeux, solide ou liquide. Le rayonnement interagit avec la matière du détecteur : effets électriques, chimiques ou lumineux résultant de l’ionisation du gaz, du liquide, du cristal ou du film photographique que le détecteur contient dans son capteur. Ces informations sont ensuite amplifiées, comptées et traitées par la sonde, pour indiquer le flux des particules radioactives, l’énergie des particules et la dose absorbée.

Ces détecteurs sont extrêmement sensibles. Ils peuvent mesurer des activités radioactives un million de fois inférieures aux niveaux nocifs pour notre santé.

Les instruments de mesures peuvent généralement être regroupés en 4 catégories :

  • les dosimètres, mesurant l’exposition externe d’un individu aux rayonnements (dosimètre photographique, dosimètre thermoluminescent) ;
  • les détecteurs de rayonnements bêta et gamma (compteur Geiger-Müller) ;
  • les détecteurs de rayonnements alpha (compteurs proportionnels à courant gazeux) ;
  • les détecteurs de neutrons.

Dans l’industrie nucléaire, le compteur Geiger est très souvent utilisé. Il permet au personnel de l’industrie nucléaire de s’assurer du bon respect des matière en termes de radioactivité.

Acteurs majeurs

Des réseaux de mesures couvrent la planète pour mesurer les variations de radioactivité dans notre environnement. Néanmoins, il revient à chaque pays de créer son réseau national de mesure de la radioactivité.

En France, l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN) effectue la plupart de ces mesures, avec la participation des exploitants d’installations nucléaires (tels qu’Areva, EDF et l’Andra). L’Autorité de Sureté Nucléaire (ASN) a pour but, entre autres, de réglementer et de contrôler les mesures de sécurité et les niveaux de radioactivité sur les sites nucléaires. De plus, certaines directions ministérielles et services de l’État en charge de contrôles sanitaires effectuent des contrôles de radioactivité dans les denrées alimentaires d’origine animale et végétale ainsi que la surveillance de la qualité de l’eau.

Signalons par ailleurs que la CRIIRAD, association antinucléaire créée après l’accident de Tchernobyl, effectue également ses propres mesures et analyses sur la radioactivité.

Aux États-Unis, l’United States Environnemental Protection Agency (EPA) et son RadNet System effectuent des mesures de la radioactivité sur le territoire américain à travers des stations de mesures fixes. En Australie, l’Australian Radiation Protection and Nuclear Safety Agency effectue ces mesures nationales de la radioactivité.

Passé et présent

Les unités de la radioactivité sont dérivées des unités du Système international d’unités (SI) dont la Conférence générale des poids et des mesures peut décider une évolution.

L’ancienne unité de mesure des sources de la radioactivité était le Curie (Ci), défini comme l’activité de 1 gramme de radium : il s’y produit 37 milliards de désintégrations par seconde. Donc 1 Ci = 37 milliards de Bq. Le Curie a été nommé ainsi en l’honneur de Pierre et Marie Curie pour leur découverte du polonium et du radium en 1898. Le Curie a été remplacé par le Becquerel en 1969, nommé en hommage à Henri Becquerel (1852-1908), physicien ayant découvert la radioactivité spontanée en 1896.

Le Gray (Gy) a été défini en tant qu’unité dérivée du Système International en 1975, remplaçant le rad. Il est nommé en l’honneur du physicien anglais Louis Harold Gray (1905-1965) qui a beaucoup travaillé sur les effets de chaque type de radiations sur la matière. Il était particulièrement impliqué dans le développement de la médecine nucléaire.

Le Sievert (Sv) est également une unité dérivée du Système International pour l’équivalent de dose depuis 1979, remplaçant le Rem (abréviation de « röntgen equivalent man », 1 rem = 10 – 2 Sv). Cette unité est nommée en hommage au radiobiologiste suédois Rolf Sievert (1896-1966), célèbre pour ses recherches sur les effets biologiques des différentes radiations et ses mesures des doses de radiations.

Concrètement

La radioactivité est omniprésente dans notre environnement naturel. En voici quelques mesures :

  • le granit : 1000 Bq/kg ;
  • les pommes de terre : 150 Bq/kg ;
  • le corps humain : 120 Bq/kg (dû au potassium 40 dans les os) ;
  • le lait : 70 Bq/litre.

Notons que pour la population, la dose efficace moyenne annuelle des expositions occasionnées par les rejets d’une centrale nucléaire en France est de 0,002mSv/an. Les actes de diagnostic médical (radiographies médicales ou dentaires) constituent la principale source d’exposition artificielle : un Français reçoit en moyenne une dose efficace de 1,3 mSv/an en raison de ces actes(2). D’autres sources d’exposition existent mais ont une intensité bien plus faible : rejets des usines de retraitement des déchets nucléaires, utilisation d’engrais phosphatés, retombées d’anciens essais aériens d’armes nucléaires et retombées de l’accident de Tchernobyl. Rappelons que l’exposition à la radioactivité d’origine naturelle en France est de 2,4 mSv/an par individu. Elle dépasse les 10 mSv/an dans certaines régions de l’Inde.

Le saviez-vous ?

La réglementation française fixe les limites de doses efficaces maximales à 1 mSv/an pour la population et à 20 mSv/an pour les travailleurs du nucléaire. Les limites réglementaires sont plus élevées pour les travailleurs du nucléaire car ils bénéficient d’un suivi médical poussé afin de vérifier périodiquement leur bonne santé et leur aptitude à travailler sous rayonnements ionisants.