La démocratie et la dette publique

Un article de Jacques de Larosière que la revue Commentaire remet en avant.

Jacques (de) Larosière

N° 142 Été 2013

Article

Quand on observe la situation financière des grandes démocraties depuis un demi-siècle, on constate que l’endettement public a, en moyenne, plus que quadruplé. C’est un phénomène impressionnant auquel on a porté peu d’attention. C’est la raison pour laquelle l’article qui suit mérite une attention toute particulière.

L’anticipation et ses insuffisances

L’anticipation peut être définie comme l’acte consistant à prévoir et à évaluer les conséquences à plus ou moins long terme des décisions prises par les gouvernants et les pouvoirs publics au sens large du terme. Or, il est de fait que l’anticipation est souvent déficiente, voire complètement absente du processus de prise de décisions, qu’il soit démocratique ou non.

Je m’attacherai d’abord à montrer la gravité et l’étendue des insuffisances en matière d’anticipation. Je m’efforcerai ensuite de rechercher si cette lacune est un caractère propre à la démocratie. Enfin, je tenterai d’expliquer les raisons pour lesquelles quelques pays démocratiques ont réussi à mieux anticiper les effets de leurs décisions.

Concernant les insuffisances de l’anticipation, je m’attacherai aux aspects financiers de la question et en particulier à l’explosion de la dette publique.

Quand on examine le résultat des décisions prises dans le domaine des finances publiques par les grandes démocraties depuis quarante ans environ, on est frappé par trois choses :le caractère récurrent des déficits publics : très rares sont les années où les budgets ont été votés en équilibre durant cette longue période ;la gravité de l’endettement public qui est le résultat de ces déficits répétés. Alors qu’au début des années 70 l’endettement public des États industrialisés se situait en moyenne autour de 20 % du PIB, nous en sommes aujourd’hui à 80-90 %, soit plus d’un quadruplement en termes réels ;le peu d’attention attaché à ce phénomène par les gouvernements et les représentations nationales.On pourrait dire : « Pourquoi est-il si important de maîtriser la croissance de l’endettement public ? » Pour une raison évidente qui s’impose à chaque ménage : l’endettement, au-delà d’un certain seuil, tend à absorber, en service d’intérêts, une part croissante et, à terme, déraisonnable des revenus disponibles : la conséquence est alors, inévitablement, l’insolvabilité et la faillite.

D’une manière plus générale, et du point de vue qui nous occupe, il faut noter que la charge du service de la dette (intérêts et remboursements) pèsera sur les générations à venir. C’est là un défi majeur au regard du fonctionnement démocratique. En effet, si la génération actuelle veut jouir des facilités budgétaires sans en payer le prix aujourd’hui, c’est qu’elle décide, en fait, d’imposer les générations futures. Le fondement même de la démocratie – le vote du budget par la représentation nationale – est donc remis en question. Comment peut-on considérer que les contribuables de demain seront entendus et traités démocratiquement si les gouvernements d’aujourd’hui, par manque d’anticipation, hypothèquent irrémédiablement leurs budgets futurs ? Si les ménages d’un pays budgétairement irresponsable ont tendance à devenir « ricardiens » dans leurs comportements (c’est-à-dire à constituer des épargnes de précaution pour provisionner les hausses d’impôts futures qu’entraînera probablement, à leurs yeux, la faillite de leur État), cela est le signe d’un déficit démocratique : ils ne sont pas réellement informés des conséquences à venir des décisions prises (apparemment de façon démocratique) par leurs gouvernants, puisqu’ils sont amenés à chercher à s’en protéger par des mesures individuelles de précaution.

Plus gravement peut-être, la théorie économique la plus récente montre qu’au-delà de 80 à 90 % du PIB, l’endettement public entrave la croissance potentielle et tend à la réduire de plus d’un point. Le degré d’endettement public joue donc un rôle majeur dans l’avenir de notre croissance et de notre emploi. Plus important que le vote par le Parlement de la loi de finances annuelle est, en fait, la tendance pluriannuelle dans laquelle ce document s’inscrit. Ce n’est qu’assez récemment que cette préoccupation commence – encore imparfaitement – à se manifester notamment dans le cadre européen.

On peut dire que, dans une perspective longue, les comptes publics manquent de sincérité puisqu’ils n’expriment pas toute la réalité. Comme le disait Montesquieu de la sincérité : « On la fuit parce qu’elle ne plaît pas, on fuit la vérité qu’elle annonce parce qu’elle est amère […] On la redoute parce qu’elle est un peintre fidèle, qui nous fait voir aussi difformes que nous le sommes. »

Cette résistance à l’anticipation est-elle propre aux démocraties ?

Ce qui est sûr c’est que la plupart des pays dont je viens de brosser les navrantes dérives budgétaires sont des démocraties.

La démocratie est-elle donc propice au « court-termisme » ? Dans une certaine mesure, on peut le penser. Les gouvernants étant élus pour des périodes relativement courtes (cinq ans en moyenne), leur préoccupation dominante est souvent leur réélection. Il est évidemment plus aisé d’être réélu si l’on s’abstient de poser les problèmes difficiles de « l’après » dont la solution présente parfois un coût politique élevé puisqu’il s’agit de défendre des générations futures (non votantes) contre les effets de la facilité de l’endettement accumulé pour les électeurs actuels. N’oublions pas non plus que les réformes de structure (par exemple ouvrir l’emploi aux jeunes en introduisant davantage de flexibilité dans le marché du travail) sont souvent repoussées parce qu’elles dérangent les détenteurs de « droits acquis » pour le bien de ceux qui frappent à la porte.

Alcide De Gasperi avait l’habitude de dire : « Un homme politique pense à la prochaine élection, un homme d’État à la prochaine génération. »

Ce court-termisme n’est pas l’apanage des seules démocraties. Les monarchies absolues ont souvent reculé devant les réformes indispensables (pensons à Louis XV : « après moi le déluge ») et, plus près de nous, de nombreuses dictatures ont connu de fort médiocres résultats en matière de capacité à anticiper. Il suffit de citer les régimes militaires d’Amérique latine, Cuba, la Corée du Nord…

Il est, du reste, également exact de dire que certains gouvernements dictatoriaux ont assez bien réussi à maîtriser leur endettement et à ménager la croissance future de leur économie (c’est le cas du général Pinochet – 1973-1990 – dont la politique économique, réussie, a été continuée, pour l’essentiel, par les gouvernements démocratiques du Chili qui lui ont succédé).

Exemples de bonne gestion anticipatrice

Les pays démocratiques qui ont le mieux réussi à anticiper et donc à éviter les effets d’accumulation d’endettement irréparables, ou qui, ayant dérapé, ont trouvé le courage et l’énergie de retrouver l’équilibre et la croissance, sont peu nombreux, mais leur expérience est riche de leçons.

Il s’agit essentiellement – dans le monde industrialisé – des pays scandinaves, de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande, du Canada et de la Suisse.

Ce sont des pays relativement peu peuplés, mais très différents de par leur structure économique et sociale.

Je pense que le trait commun qui permet d’expliquer leur capacité à anticiper et à prendre les décisions en conséquence peut être résumé en un mot : la transparence.

Leurs positions politiques sont souvent divergentes sur maints sujets : ces pays ne sont nullement des espaces d’unanimité. Mais il y existe une capacité à débattre sur les grandes questions et notamment sur ceux de leurs aspects qui déterminent l’avenir. Aucun parti d’importance ne pourrait proposer des mesures engageant l’avenir (soit par action soit par omission) sans qu’elles ne fassent l’objet de chiffrages et de discussions dans des débats publics. Le fait pour un gouvernement de s’engager dans une politique d’endettement déraisonnable provoquerait aussitôt des controverses. Le problème des effets de décisions présentes sur les générations futures ne pourrait être escamoté. La presse et les médias en général sont beaucoup plus présents dans les débats qu’ils ne le sont dans un pays comme la France. Chez nous, les problèmes de fond sont, certes, posés et traités par les spécialistes, mais il est rare que les hommes politiques soient contraints par les médias à aller au-delà de leurs « programmes » et à discuter ouvertement du long terme, des réformes de structure et des options fondamentales qui se posent à la société pour son avenir.

On dira que c’est une différence de mentalités et de formation qui caractérise ces pays, une plus grande aptitude au sérieux, la nécessité aussi pour des économies de taille relativement modeste de préserver à tout prix leurs atouts. À quoi il est facile de répondre que nos atouts sont loin d’être illimités, et surtout que la démocratie est affaire d’engagement pour l’avenir et que si nous souffrons d’une faiblesse à anticiper, que nos médias sont trop superficiels et que notre système éducatif n’incite pas à traiter les problèmes de société tels qu’ils se posent réellement, c’est que notre démocratie ne fonctionne pas comme elle le devrait. À nous de tirer les leçons de transparence et de responsabilité de ceux qui ont réussi à mieux anticiper !

La surveillance multilatérale

Il est possible, du reste, que ce problème du dysfonctionnement de l’anticipation en démocratie soit résolu par la voie de la pression internationale. Les marchés financiers finissent par sanctionner les États dont le comportement budgétaire est irresponsable : en relevant les taux d’intérêt exigés et en abaissant leurs notations. Alors, la pression s’accroît et les gouvernements sont forcés d’agir, mais trop tard et dans les plus mauvaises conditions. C’est là qu’intervient la notion de « surveillance » multilatérale ; des organisations internationales, comme le FMI ou la Commission européenne, se voient doter, de plus en plus, de certaines responsabilités et même de certains pouvoirs, afin de soumettre – ou d’inciter – leurs membres, à titre préventif, à suivre des comportements économiques plus adéquats. Il faut, en effet, souligner que, dans un monde globalisé, les erreurs des uns réagissent négativement sur la collectivité mondiale tout entière. Le Pacte européen de stabilité budgétaire, actuellement en cours de ratification, obligerait les États membres à suivre certaines normes pluriannuelles en matière d’évolution et de correction de leurs finances publiques, tout en constitutionnalisant le principe de l’équilibre structurel à moyen terme. Ces cadres – négociés en commun et destinés à définir des trajectoires pour l’avenir – constituent un moyen de sensibiliser – et d’inciter – nos démocraties à la nécessité d’inscrire leurs décisions dans une perspective longue.

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De : Revue Commentaire <no-reply@commentaire.fr>
Date: ven. 9 avr. 2021 à 12:06
Subject: La dette publique
To: <pierre.tarif@gmail.com>

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La dette publique La lettre du vendredi 9 avril 2021 Quelques gens ont cru qu’il était bon qu’un État dût à lui-même : ils ont pensé que cela multipliait les richesses en augmentant la circulation. La dette ôte les revenus véritables de l’État à ceux qui ont de l’activité et de l’industrie, pour les transporter aux gens oisifs ; c’est-à-dire qu’on donne des commodités pour travailler à ceux qui ne travaillent point, et des difficultés pour ceux qui travaillent.
MONTESQUIEU
Il est étonnant, mais il est vrai, que cette immense dette n’aurait point été un fardeau impossible à soutenir, s’il y avait eu alors un commerce florissant, un papier de crédit établi, et des compagnies solides qui eussent répondu de ce papier.
VOLTAIRE
Comme on voit le problème des dettes publiques n’est pas nouveau. Il tient aux gouvernements qui préfèrent emprunter que taxer. Ils le font parfois à bon escient et parfois non. Car cela tient aussi aux situations économiques et politiques qui peuvent à certaines conditions rendre possible, légitime et nécessaire ce mode de financement des dépenses publiques. Autrement dit :  il n’existe pas de réponse unique et facile à la question de la dette publique. Voici quelques articles publiés par Commentaire sur cette question.   De l’importance d’être crédible Philippe Trainar (1) Les dettes publiques actuelles sont-elles soutenables ? Olivier Blanchard, Alvaro Leandro, Jeromin Zettelmeyer (2)

N° 173 Printemps 2021
À l’automne 2019, Olivier Blanchard, sur la dette publique avançait son argument en faveur d’un accroissement de l’endettement public non sans précautions, en soulignant qu’un accroissement de l’endettement public n’est soutenable que s’il permet de financer des dépenses publiques dont le rendement est supérieur au coût de la dette, ce qui lui semblait plus aisé en raison du niveau très bas des taux d’intérêt. Entre-temps, le Covid-19 et le confinement ont paralysé l’économie mondiale. Les taux d’intérêt à court-moyen terme ont chuté aux États-Unis. En revanche, ils n’ont que très marginalement diminué au sein de la zone euro, où ils étaient déjà négatifs à l’automne 2019. C’est dans ce contexte qu’Olivier Blanchard a souhaité, dans l’article que Commentaire publie, approfondir sa réflexion sur la soutenabilité des dettes publiques. Cet article explore comment penser la soutenabilité des dettes publiques. [Lire les articles – (1)(2)]   De la dette publique comme souci politique raisonnable Philippe Trainar

N° 167 Automne 2019 Avec la montée des incertitudes économiques, financières, politiques et géostratégiques, le débat sur le rôle des finances publiques est relancé. L’on s’interroge sur l’efficacité des politiques budgétaires actuelles et notamment sur la pertinence des stratégies de réduction des déficits publics et des dettes publiques. Plutôt que de rechercher coûte que coûte à poursuivre ces stratégies, ne faudrait-il pas s’inquiéter des signes de ralentissement qui s’accumulent, tirer parti des faibles taux d’intérêt et privilégier un soutien de la demande par les finances publiques ? Les trois articles qui suivent posent clairement les termes de ce débat et concluent que, si, en principe, une stratégie budgétaire proactive se justifierait au vu des circonstances actuelles, il en va différemment, en pratique, en Europe et en France où les marges de manœuvre permettent difficilement de prendre des risques. [Lire l’article]   Coût budgétaire et social de la dette publique en période de faibles taux d’intérêt Olivier Blanchard

N° 167 Automne 2019 L’objet de cet article de politique économique est de présenter le raisonnement en termes plus simples que dans un document originel publié par ailleurs, d’intégrer les objections adressées à ce raisonnement et d’analyser les implications pratiques en termes de politique budgétaire. [Lire l’article]   Quand la dette devient monnaie Bertrand Martinot

N° 152 Hiver 2015
Le rachat massif de la dette publique par les banques centrales (quantitative easing) pour relancer l’économie et éviter la faillite de certains États ramène l’attention des économistes sur quelques dilemmes oubliés de la politique monétaire. C’est l’occasion de revisiter l’épisode inaugural et traumatique de la banqueroute de Law, il y a bientôt trois siècles. Sans exagérer les troublantes « concordances des temps » entre les deux épisodes, on tirera un profit certain à méditer les enseignements économiques du génial créateur d’une monnaie totalement déconnectée du métal précieux. [Lire l’article]   Les dettes publiques : sept observations Jean Gatty

N° 148 Hiver 2014 Les dettes publiques des grands États demeurent méconnues quant à leur quantité, nature et conséquence. Elles sont comptées en dépit du bon sens. Réputées catastrophiques pour des montants sinon minimes du moins raisonnables. Grossièrement sous-estimées s’agissant des engagements. La dette publique française est un exemple type. Voici sept observations à ce sujet. [Lire l’article]   La démocratie et la dette publique Jacques de Larosière

N° 142 Été 2013 Quand on observe la situation financière des grandes démocraties depuis un demi-siècle, on constate que l’endettement public a, en moyenne, plus que quadruplé. C’est un phénomène impressionnant auquel on a porté peu d’attention. C’est la raison pour laquelle l’article qui suit mérite une attention toute particulière. [Lire gratuitement l’article]   La dette de l’Afrique Christian Saint-Étienne

N° 52 Hiver 1990 La crise de l’endettement des pays en voie de développement a contribué à fragiliser le système monétaire international dans les années 1980 par la menace qu’elle a fait peser sur la solvabilité des grandes banques internationales. Elle a également contribué à la réduction de la croissance économique de l’Afrique subsaharienne devenue le continent le plus pauvre du monde. Pour comprendre les risques associés à la dette, il faut distinguer les différents types d’endettement selon le degré de développement économique des débiteurs et la nature des créditeurs. [Lire l’article]   L’endettement international. Examen d’une crise Paul Mentré

N° 27 Automne 1984 La rupture intervenue en 1982 dans le comportement des banques en matière de prêts aux pays en développement a eu des conséquences majeures. Les pays emprunteurs ont eu à s’ajuster à cette réalité nouvelle, le plus souvent dans le cadre de programmes négociés avec le Fonds monétaire international. Les résultats obtenus en termes de balance des paiements ont été spectaculaires puisque le déficit courant des pays en développement non pétroliers est revenu de 110 milliards de dollars en 1981 à 80 milliards de dollars en 1982 et 55 milliards de dollars en 1983, avec un chiffre comparable prévu pour 1984. Mais le prix de cette amélioration a été un ralentissement sensible de la croissance des pays en développement non pétroliers revenue à 1,5 % par an tant en 1982 qu’en 1983, chiffre à comparer à un rythme annuel moyen de 5 à 6 % de 1967 à 1980, et de 3 % en 1981. La rupture était-elle inévitable ? Comme chacun sait, les prévisions économiques les plus sûres sont celles qui sont faites a posteriori. Aujourd’hui, les analyses semblent converger pour indiquer que la rupture était fatale, et contenue en germe dans le comportement antérieur des banques et des pays emprunteurs. Les choses sont en réalité moins simples, et il fallut la conjonction imprévue d’événements économiques et politiques pour que soient pleinement mises en lumière certaines vulnérabilités. [Lire l’article] *
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